Venue de Catherine Anne le 8 mars 2016 au collège auprès des classes de 6E (Mme Pirotais) et de 5G (Mme Coelho)
La première question de l’entretien fut posée par Catherine Anne aux élèves de 6E qui avaient préparé une mise en scène et appris un passage de la pièce «Sous l’armure» qui sera représentée le 18 mars à Mazé dans une mise scène de Christian Duchange.
«Comment avez-vous choisi le passage que vous avez-joué?
Les élèves répondirent qu’ils avaient tiré au sort le passage qu’ils venaient de jouer.
Le jeu des questions et des réponses s’inversa ensuite lorsqu’une élève demanda:
«Vous aimeriez que les spectateurs trouvent votre pièce drôle, triste ou magique?
Voici une restitution de l’échange qui suivit:
Catherine Anne: -Peu m’importe, un peu tout cela à la fois. J’aimerais que quelque chose les touche parce que cela ne les aura pas laissés indifférents.
-Pourquoi avez-vous écrit la pièce «Sous l’armure?»
CA:» La radio France Culture qui propose des fictions radiophoniques m’avait demandé d’écrire une pièce de 30 minutes sur la thématique du Moyen Age.Je me suis documentée et lu des livres de littérature jeunesse sur cette période. J’ai donc écrit «Christine et Thibault»-prénoms qui évoquent le Moyen-Age pour moi- une première version de «Sous l’armure» à cette occasion.
Quelques années plus tard, j’ai repris et retravaillé cette pièce, ajouté notamment le personnage de Ménestrelle»
-Pourquoi avoir choisi une cadre de famille noble pour situer votre histoire?
CA: «Ce sont les nobles qui dominent le monde au Moyen-Age: ils possèdent la terre, les châteaux, l’argent, les armes. Ce qui fait le plus rêver lorsqu’on évoque le Moyen -Age , ce sont les châteaux et les seigneurs.Le monde paysan ne fait peut être pas tant rêver. Il est néanmoins évoqué dans la pièce avec une famille hospitalière qui ne peut pas avoir d’enfants.
J’ai voulu parler du thème du POUVOIR dans cette pièce car plus on a de pouvoir , moins on a de liberté.»
-Pourquoi et comment êtes-vous devenu dramaturge?
CA: «J’avais envie de faire du théâtre quand j’étais adolescente puis j’ai écrit des pièces de théâtre. J’aime beaucoup le partage des mots au théâtre. Je trouve que dans la vraie vie, les mots sont très violents ou très réparateurs. En tout cas, ils possèdent un grand pouvoir. Je suis sensible à la manière dont les gens se parlent. Dans la vie, on peut également se trouver démuni lorsqu’on n’a pas les bons mots au bon moment.
Au théâtre, on peut dire des choses très importantes. Le théâtre, c’est le partage tandis que l’on ne peut écrire que lorsqu’on est seul»
-Comment trouvez-vous l’imagination pour écrire des pièces de théâtre?
CA: «Les idées viennent de la vie et des choses que j’invente. C’est un mélange.. ce qui est inventé dit des choses de la vie aussi. Vers 10-12 ans, j’écrivais des poèmes.Puis j’ai voulu faire du théâtre, jouer et donc je me suis mise à écrire des pièces de théâtre.
-Combien de temps mettez-vous pour écrire?
CA: «Cela est très variable. Cela peut mettre six mois, deux ans ou toute la vie que l’on a eue avant le moment de l’écriture.Je m’installe à une table pour écrire. Je m’impose des contraintes. Si je ne me mets pas de contraintes, alors je n’arrive pas à terminer une pièce.
-Pourquoi n’ y a t-il pas de ponctuation dans «Sous l’armure?»
CA: Et vous, qu’en pensez-vous? Que provoque le fait qu’il n’y ait pas de ponctuation dans la pièce?
Les élèves donnent diverses réponses.
CA« Oui, cela laisse plus de choix dans l’interprétation des sentiments des personnages. Je mets souvent moi-même mes textes en scène. La respiration se fait quand on passe à la ligne. Je propose un rapport au souffle et à la pensée. Dans ma dernière pièce publiée «La Caravana», le texte est très ponctué au contraire.Le personnage de la châtelaine dans «Sous l’armure» est un personnage de la retenue, un personnage interrompu. «Les larmes sont des gestes empêchés, des mots retenus», dit-elle.
Imaginer la respiration à la place de la ponctuation permet de visualiser cela.
-Connaissez-vous la fin de vos histoires lorsque vous commencez à écrire?
C A: «Quand je commence à écrire une histoire, je ne sais pas comment elle va finir. Si je le savais, je ne passerai pas autant de temps à écrire car cela ne m’intéresserait pas.L’histoire en cours d’écriture peut se comparer à un chemin que l’on n’a encore jamais emprunté.
-Aimeriez-vous être à la place de l’un des personnages de «Sous l’armure»?
CA: «Je me sens proche de tous les personnages de la pièce mais plus particulièrement de celui de «Ménestrelle» qui cristallise en quelque sorte la question de l’identité sexuelle.Le fait d’être obligé de se conformer à tel ou tel stéréotype selon que l’on est une fille ou un garçon est lourd de contraintes. La journée de la femme (nous sommes le 8 mars!) induit un problème de société en fait.Pour moi, on est empoisonné par des idées toutes faites sur ce que doit être une fille ou un garçon . La publicité, les histoires (dans certains livres) sont à l’image d’un monde qui n’est pas à égalité entre les hommes et les femmes.Il n’y a pas d’instinct maternel. S’occuper d’un bébé, cela s’apprend que l’on soit un homme ou une femme.
Les élèves sont très intéressés par ce sujet et des échanges à bâtons rompus ont lieu à ce moment-là.
-Quelle est la pièce que vous préférez parmi celles que vous avez écrites?
CA: «Dans la caravana» et «Petit» sont des pièces contemporaines. Je les aime bien mais je ne peux pas dire que je les préfère.
-Aimez-vous bien votre métier?
CA: «Oui, j’aime beaucoup mon travail. Il est varié, difficile mais beau . Il me permet de rencontrer des jeunes gens comme vous.
-Combien de pièces avez-vous publiées?
CA: «J’ai publié ma première pièce à l’âge de 27 ans et j’ai dû en publier une trentaine depuis..
-Combien de temps mettez-vous par jour pour écrire?
CA: «Je peux passer cinq-six heures par jour à écrire. Parfois, je pars une semaine ou deux, seule à la campagne où je ne fais qu’écrire, me promener pour être en immersion avec la pièce.
-Quels sont vos auteurs préférés?
CA: «J’aime beaucoup Henri Michaux et Marguerite Duras. En littérature jeunesse, je vous conseille de lire Susie Morgenstern («Joker») et Karin Serres.
-Avez-vous peur parfois que «cela ne marche pas, que le succès ne soit pas au rendez-vous?
CA: «Non ,je ne pense pas au succès d’une pièce lorsque j’écris».
Merci Catherine Anne pour vos réponses .
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